Fiction de crue

Collectif

Exposition

18 Juin > 10 Juillet 2011

Vernissage

18 Juin à partir de 17h30

Fiction de crue

LE LOIR-ETRE

« D’habitude, l’étrange circule discrètement sous nos rues. Mais il suffit d’une crise pour que, de toutes parts, comme enflé par la crue, il remonte du sous-sol, soulève les couvercles qui fermaient les égouts et envahisse les caves, puis les villes. Que le nocturne débouche brutalement au grand jour, le fait surprend chaque fois. Il révèle pourtant une existence d’en dessous, une résistance interne jamais réduite. Cette force à l’affût s’insinue dans les tensions de la société qu’elle menace. Soudain, elle les aggrave, elle en utilise encore les moyens et les circuits, mais c’est au service d’une « inquiétude » qui vient de plus loin, inattendue ; elle brise des clôtures ; elle déborde les canalisations sociales ; elle s’ouvre des chemins qui laisseront après son passage, quand le flux se sera retiré, un autre paysage et un ordre différent. » (La possession de Loudun, présentée par M. de Certeau, coll. Archives, n° 37, éd. Julliard, 1970, p. 7)

Le « Loir-être » (en crue) et son braconnage : scénario fiction (science), mise en scène d’exposition

Proverbe turc : « les nuits sont enceintes et nul ne connaît le jour qui naîtra »

A travers le Loir, la crue, le flux, l’immersion, que se passe-t-il lorsque l’eau se retire : reflux, mutation, fusion, création d’un autre, déformation, provocation, engloutissement, inondation, débordement, glaciation, naufrage, amphibie, noyade, distorsion, morphing, hybridation, stratification.

Parler d’une chose difficilement identifiable, qui se constitue qu’au travers de scénarios de fiction, d’hybridation, de greffes hétérogènes, de formes multiples et contradictoires.

D’une chose qui refuse l’idée même qu’une prévision puisse être émise quant à sa forme de croissance, quant à la détermination de son futur, une chose informe sur un tissu existant par distorsion, une chose qui ne cherche pas un point de fuite pour justifier de son existence mais qui accepte de palpiter, de s’immerger, de flotter dans un état vibratoire.

Cette chose humide, aquatique, est un organisme produisant de nouvelles temporalités et réalités, le trouble de l’identité, la furtivité, l’hybridation et la mutation deviennent des modes opératoires.

Le Loir (après la crue) peut être considéré autrement que comme un outil de représentation, mais être lui-même le support de sa transformation et l’interface avec le réel (la métamorphose du territoire). Le Loir devient une matrice physique générique des différents projets à travers leur processus de déformation, ils ne seront plus issus d’une projection abstraite mais d’une distorsion  du réel.

Pour élaborer des stratèges de mise en scène, produire des objets ectoplasmatiques basés sur ces processus de mutation, il nous faut déterminer au préalable une matrice, un corps qui puisse les absorber (dans sa chair) à l’image d’un organisme en devenir pour évoquer « de façon saisissante quelque chose d’inconnu et d’insaisissable qui surgit, montée de ses secrètes profondeurs, et ébranle la tranquillité de l’ordre social ».

Michel BONIZEC, Claire COHEN LACHIVER, Marianne DAQUET, Jean-Philippe FOURNIER, Agnès HOSPITALIER, Christophe JALLAIS, Sophie JUILLARD, Marie-Pierre V.LABOULANDINE, Pol LE MEUR, Jed MARTIN, Eléonore MORAND, Jean-Pierre MORAND, Vijay SONI, Maeva VERAN.

 

Jean-Pierre Morand